Fermeture définitive de La Coutinelle : le bilan

Le restaurant sans gluten La Coutinelle était une institution pour les cœliaques mais aussi pour certains poly-allergiques qui venaient ici manger sans crainte.

Après quatre ans d’ouverture, c’est à grand regret que les gérants ont annoncé en novembre dernier la fermeture définitive de leur restaurant. Ils s’expliquent aujourd’hui sur leur décision.

Un constat : difficile d’être rentable sur le secteur du sans gluten

« On aurait eu comme nom « Pizza et Burger », les gens seraient plus facilement rentrés dans notre restaurant » plaisante Nicolas. De l’humour sur fond de vérité. Le terme « sans gluten » peut faire peur à ceux qui ne sont pas concernés par la maladie cœliaque. Au fond, un restaurant sans gluten, ça évoque quoi dans l’esprit des gens ? Pas grand-chose. On ne sait pas ce qu’on va y manger, alors n’y entre souvent que parce qu’un proche cœliaque nous y emmène.

Dans ce secteur concurrentiel qu’est la restauration, chaque service compte. Les charges sont élevées. Faire du sans gluten est aussi un peu plus cher et plus contraignant.

La restauration : un rythme de vie effréné

Dès le départ, Mai Lan et Nicolas ont tenu à tout faire maison : le pain, les pâtisseries, les plats, les commandes spéciales… « Faire le pain, surtout, était chronophage. » Après avoir mis longtemps à élaborer la bonne recette sans gluten , La Coutinelle a augmenté sa production boulangère car les clients ont trouvé le pain tellement bon qu’ils venaient en chercher régulièrement, y compris ceux qui pouvaient manger du pain au blé. Sauf qu’ils n’étaient pas une boulangerie, mais un restaurant, et qu’il fallait aussi produire le reste ! La Coutinelle était ouverte du jeudi au samedi mais le travail commençait dès le lundi (nettoyage, administratif, préparations).




Entre l’élaboration des recettes, l’achat des produits au marché local le samedi matin, la production, le nettoyage, la gestion des réseaux sociaux et de l’administratif, les commandes sur place et à emporter, le couple a vite été surmené. « La restauration, c’est aussi beaucoup de contraintes et de manutention ». « Faire tout ce travail à deux seulement, c’était très difficile ». De même, les commandes spéciales de gâteaux d’anniversaire mettaient souvent en péril les services du samedi. A deux, impossible aussi d’ouvrir plus souvent pour augmenter le nombre de services. L’ouverture en continu du jeudi au samedi était le bon compromis pour limiter les pertes en cuisine et avoir une vie de famille en début de semaine.

Nicolas ne s’en cache pas, pour lui travailler en cuisine était aussi très éprouvant physiquement, tout comme le travail de nuit. Avec trois enfants, la vie de famille en pâtit forcément.

Fatigue, surmenage, pression du service… Le couple avait pensé à réduire la carte mais leur cœur se brisait à l’idée de décevoir certains clients.

Une belle expérience humaine

Ils voulaient rendre possible l’impossible. Manger une pizza ou un burger, comme tout le monde, alors qu’on était allergique au gluten ou au lactose, était un rêve accessible à La Coutinelle.

Mus par l’envie de rendre service dans un secteur où chaque repas rendu possible est presque un cadeau tombé du ciel, ils se sont jetés à corps perdus dans leur projet, servant des plats adaptés aux besoins de tout un chacun. Parfois, le risque de présence d’un autre allergène était un stress énorme. Mai Lan et Nicolas se souviennent avec émotion de la venue d’Hugo et ses parents (d’Hugo et les allergies) : la pizza d’Hugo a été cuite dans un autre four (ce qui était possible à l’époque) pour éviter les vapeurs de fromages…

C’était très compliqué à mettre en œuvre car La Coutinelle n’était qu’un restaurant 100% sans gluten et les traces d’autres allergènes étaient donc toujours possible. Mais Mai Lan et Nicolas le faisaient de bon cœur car la reconnaissance des clients et les compliments qu’ils recevaient régulièrement valaient tout l’or du monde. Ils rendaient les gens heureux et ils étaient heureux de rendre service !

L’aventure humaine est la partie qu’ils vont le plus regretter : certains clients sont devenus des copains, d’autres des amis ; des milliers d’heures à refaire le monde, rire, apprendre des choses.

Pourtant, lorsque leur implication dans leur travail a été ressentie comme un sacrifice de leur vie personnelle, ils ont compris qu’ils devaient arrêter. Sans salaire, sans jamais assez de temps pour améliorer la décoration ou l’ambiance musicale du restaurant, toujours frustrés de ne pas pouvoir faire mieux encore, leur décision a fait son chemin.

La Coutinelle a été un lieu de partage où il faisait bon vivre. Merci à Mai Lan et Nicolas de nous avoir permis de connaître ces moments, de nous avoir réappris à vivre avec la maladie cœliaque. Maintenant, il est temps qu’ils pensent un peu à eux non ? Et à nous de mettre en pratique les belles leçons de vie qu’ils nous ont donné. Dès ce soir, je m’essaie à la réalisation d’un burger Juju, le grand classique de leur carte 😉

Un mot de la part de La Coutinelle :

« La décision de fermeture a été très dure mais l’annonce l’a été encore plus. Les messages sur les réseaux sociaux, les appels nous ont beaucoup touchés. Les gens se sont bougés pour nous dire au revoir, parfois de loin (un chef d’entreprise a changé son emploi du temps pour manger une dernière fois), parfois plusieurs fois (quasiment tous les jours sur les 2 dernières semaines). On ne pensait pas que nous allions autant leur manquer.

Un grand merci à tous les gens qui ont contribué à l’histoire de La Coutinelle. Nous sommes très contents d’avoir donné un moment de gloire à ceux qui ont nous marqué en donnant leur nom à un plat ou une bûche de Noël. Un petit secret, 2 personnes ne font pas partie de notre entourage : le burger Pierre était un clin d’oeil à Pierre Rabhi et le burger Lorenzo était une blague avec nos enfants car c’est le petit-fils que nous n’avons pas encore.

Pour avoir des nouvelles si un autre projet voit le jour, remplissez le formulaire ici.

Nous sommes partis avec une partie du matériel : four et matériel de pâtisserie. Pour le moment, nous nous reposons et réfléchissons pour une nouvelle ouverture (ou pas !). Nous n’avons d’ailleurs par encore fait de pain ou de brioche ! Les personnes qui ont rempli le questionnaire seront prévenues si nous continuons ou pas dans le sans gluten. »

Mai Lan et Nicolas

 

Une réflexion sur “Fermeture définitive de La Coutinelle : le bilan

  1. Dommage certains adhérents de l’AFDIAG appréciaient votre cuisine en particulier (la pizza blanche).Bonne chance pour la suite.
    Cordialement

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *